Chéri de Colette

Publié le par kalistina


Léa de Lonval, une courtisane de près de cinquante ans, est la maîtresse de Fred Peloux, appelé Chéri. A mesure qu'elle éprouve le manque de conviction croissant de son jeune amant, Léa ressent, avec un émerveillement désenchanté et la lucidité de l'amertume, les moindres effets d'une passion qui sera la dernière. Pourtant il suffira à Chéri d'épouser la jeune et tendre Edmée pour comprendre que la rupture avec Léa ne va pas sans regrets.

Dans ce roman, les personnages évoluent tous dans une sorte de huis clos, dans un univers particulier qui est celui des « demi-mondaines », comprenez les courtisanes qui doivent leur impressionnante fortune à leur pouvoir de séduction et à leurs généreux amants.

Léa est l’une de ces demi-mondaines ; à 49 ans, elle a encore un physique superbe et ne manque pas de prétendants. Son amant en titre, et ce depuis sept ans, est Fred, dit Chéri, le fils d’une de ses amies. Il est donc bien plus jeune qu’elle et la connaît depuis qu’il est né, ce qui fait que leur relation a des accents malsains ; Chéri se comporte comme un enfant gâté et Léa le réprimande comme une mère rappelle à l’ordre son enfant…

Outre cet aspect incestueux, leur relation est ambiguë du fait de tous les non-dits qui la composent. Léa veut se persuader qu’elle ne fait que prendre du bon temps avec Chéri, tandis que Chéri se dit que Léa aura été une bonne maîtresse dans l’apprentissage des plaisirs charnels… Mais quand Chéri doit se marier, avec une femme très jeune, fille d’une autre demi-mondaine, ils font chacun l’apprentissage de la souffrance amoureuse.

Colette décrit habilement la douleur en amour, et s’avère vraiment fine psychologue. Elle est drôle, aussi ! Le personnage de « Mâme Peloux », la mère de Fred, a la manie de toujours répéter deux fois ce qu’elle dit, ce qui est ridicule, donc franchement amusant. On rit jaune, aussi, quand on voit comme les deux héros sont parfois misanthropes, quand ils ne sont pas tout à fait méprisants face à ceux qui les entourent.

Enfin, on admire la liberté du livre, qui décrit un monde de scandale, une histoire scandaleuse puisqu’adultère et mettant en scène deux amants à la forte différence d’âge, et aussi un certain féminisme, puisque les codes sont inversés : c’est Léa qui est indépendante, libérée, intelligente, tandis que les personnages masculins du roman apparaissent bien frivoles, superficiels, ne pouvant susciter l’intérêt que par leur physique.

Je n’avais jamais lu Colette et je découvre un grand auteur, au style percutant et farouchement libre pour l’époque ; une lecture que je vous conseille !!

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I
@kali : c'est pas l'envie qui me manque, c'est le temps. Les affres de la PAL... Merci de la proposition en tout cas. En plus Dandy est parti loin maintenant.
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K
<br /> Je ne peux que comprendre! ;-)<br /> <br /> <br />
I
J'avais vraiment beaucoup aimé les extraits que tu en avais lu et la manière dont tu avais présenté le personnage principal. Elle a des cotés tellement féminins à se poser plein de questions, ça en est presque rassurant sur soi-même :D
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K
<br /> C'est Dandy qui l'a embarqué, si jamais tu as envie de le lire à ton tour!<br /> <br /> <br />
N
Je connaissais Colette pour sa série un peu mièvre, mais je dois avouer que je ne connais pas ce roman, Kali ... Une belle découverte, qui me rappelle un autre titre de cette période "La Garçonne" de Victor Marguerite. A lire pour son ton très libre sur la femme des années 20.
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K
<br /> je ne connais pas du tout Victor Marguerite...<br /> <br /> <br />
M
Comme toi, je n'ai jamais lu cette auteure, je le note ...
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K
<br /> Elle a vraiment un style fin, et lire Colette vaut le coup ne serait-ce que pour son art de la phrase qui fait mouche.<br /> <br /> <br />