L'assommoir d'Emile Zola
Que faire quand on est, comme Gervaise, une ouvrière, avec deux enfants, dans le Paris populaire de 1850 et qu'on ne manque pourtant ni de courage, ni de générosité, ni de projets ? Gervaise compte sur le zingueur Coupeau pour l'aider à se reconstruire.
Mais à qui se fier au milieu de gens malveillants que son énergie vitale rend jaloux ? Et Gervaise pourra-t-elle déjouer l'implacable hérédité familiale et les maléfices de l'alambic ? L'Assommoir, qui fit scandale lors de sa publication, est considéré de nos jours comme le plus grand roman de Zola, avec Germinal. Dans ce premier roman français à mettre en scène la vraie misère du monde ouvrier au XIXe siècle, Zola plonge son lecteur dans la joyeuse convivialité de grandes scènes populaires, tout en lui faisant partager les espoirs, les inquiétudes et les faiblesses d'une femme qui cherche, tout simplement, à vivre.
Gervaise est la soeur de Lisa Quenu, héroïne du Ventre de Paris, la fameuse soeur que Lisa ne tenait pas à présenter à son entourage. Comme sa soeur, elle quitte Plassans pour monter à la capitale, sous la pression de son compagnon Auguste Lantier.
Elle n'a que 22 ans mais déjà deux garçons de 4 et 8 ans ; quant Lantier la quitte, elle est, pense-t-elle, au plus bas. Elle se jette à corps perdu dans son travail de blanchisseuse pour subvenir aux besoins de ses enfants et vivre chichement mais honnêtement (d'ailleurs, encore une fois, Zola sort ses grosses ficelles bien voyantes : elle est blanchisseuse, vous dit-on, voilà qui est riche d'interprétations).
Coupeau, ouvrier zingueur, fait la cour à Gervaise, tant et si bien que, malgré ses réticences, elle accepte sa demande en mariage. Ses désirs sont simples :
"Mon Dieu ! je ne suis pas ambitieuse, je ne demande pas grand-chose… Mon idéal, ce serait de travailler tranquille, de manger toujours du pain, d’avoir un trou un peu propre pour dormir, vous savez, un lit, une table et deux chaises, pas davantage… Ah ! je voudrais aussi élever mes enfants, en faire de bons sujets, si c’était possible… Il y a encore un idéal, ce serait de ne pas être battue, si je me remettais jamais en ménage ; non, ça ne me plairait pas d’être battue… Et c’est tout, vous voyez, c’est tout…".
Tout est là. L'idéal de départ, l'ascension et, vous vous en doutez bien puisqu'on est chez Zola, l'inexorable chute...
J'ai lu ce roman avec un pincement continu. On sait comment tout cela va s'achever, mais c'est comme dans Titanic, on voudrait qu'elle finisse par lui laisser un bout de bois, on se dit que si on le pense très fort ça va finir par arriver... Voir la chute de cette femme si bonne m'a fendu le coeur. Les romans du cycle des Rougon-Macquart sont rarement bien joyeux, mais je n'avais pas ressenti tant d'empathie pour les personnages des tomes précédents.
La déchéance du couple d'ouvriers pourtant si méritants, les ravages de l'alcool mis au grand jour, voilà qui explique l'accueil peu chaleureux des critiques fait à la parution de L'Assommoir. Cependant, c'est justement cette vérité sans fard qui fait sa force, ce malheur si ordinaire, si réaliste.
Livre lu dans le cadre du challenge "On a une relation comme ça, Emile Zola et moi".
Les billets de Moka, instigatrice du challenge, et de Louis.