Le diable au corps de Raymond Radiguet
Ah ! que la guerre est jolie quand on a quinze ans et que l'on aime ! Sur les bords de la Marne, tandis que tonne le canon, ils s'aiment, en effet, de passion coupable. Lui, un peu veule, à peine sorti de l'adolescence, nourri de Rimbaud, épris de liberté. Elle, déjà femme, risquant l'impossible du haut de ses 19 ans. Tous deux ivres de ce printemps assassin de 1917. Marthe vient juste de se marier ; Jacques, son époux, est au front. Le tromper au grand jour, c'est pousser trop loin l'inconscience, la trahison, le scandale...
Le héros et narrateur du "diable au corps" est un adolescent à l'éducation très libre, surtout pour l'époque. Il rencontre Marthe, de 3 ans son aînée, avec laquelle il va faire son apprentissage amoureux. Il analyse ses réactions avec détachement, comme s'il n'était pas concerné par ses propres actes ; cela ne l'empêche pourtant pas d'être parfois d'une confondante mauvaise foi (j'évoque ici son point de vue tout personnel de l'adultère...). Est-ce l'effet de la passion? De la jeunesse? De l'égocentrisme?
Quant à Marthe, elle est parfois agaçante de naïveté et de soumission. Elle a beau être considérée comme la pécheresse de l'histoire, c'est une vraie oie blanche, ne voyant pas les sarcasmes des autres ni la façon dont le héros la manipule.
Il me semble que le scandale réside bien sûr dans le déroulement de l'histoire (le soldat n'est pas ici le héros sacralisé par la nation, mais le bon couillon à qui les cornes n'en finissent pas de pousser), mais aussi dans l'immoralité (ou amoralité?) du héros.