La curée d'Emile Zola
La France de Napoléon III vue par Zola : " A cette heure, Paris offrait, pour un homme comme Aristide Saccard, le plus intéressant des spectacles. L'Empire venait d'être proclamé... Le silence s'était fait à la tribune et dans les journaux. La société, sauvée encore une fois, se félicitait, se reposait, faisait la grasse matinée, maintenant qu'un gouvernement fort la protégeait et lui ôtait jusqu'au souci de penser et de régler ses affaires. La grande préoccupation de la société était de savoir à quels amusements elle allait tuer le temps. Selon l'heureuse expression d'Eugène Rougon, Paris se mettait à table et rêvait gaudriole au dessert... L'Empire allait faire de Paris le mauvais lieu de l'Europe. "
Dans ce deuxième tome des Rougon-Macquart, on suit Aristide, l'un des fils de Pierre Rougon, dans sa nouvelle vie. Monté à Paris avec pour ferme ambition de faire fortune, sa femme Angèle, douce, effacée, inexistante, a la bonne idée de mourir assez rapidement, ce qui lui permet de faire un second mariage très avantageux.
Sa nouvelle femme, Renée, est jeune, très belle, d'une famille riche, et s'ennuie terriblement auprès de ce mari qui ne s'intéresse absolument pas à elle. Grâce à son frère Eugène, Aristide obtient une bonne position et ne pense plus qu'à l'argent qu'il peut gagner ; c'est le début de machinations financières peu scrupuleuses autour de transactions immobilières (c'est la période hausmannienne).
Aristide est donc totalement obnubilé par le dieu argent, et toutes ses relations personnelles sont guidées par cette marotte. C'est ainsi qu'il fait monter à la capitale son fils Maxime, né du premier lit, dans le seul but d'asseoir sa position de bon bourgeois père de famille. Renée, qui s'ennuie terriblement, rappelons-le, s'amuse avec cet adolescent à qui elle fait découvrir toute la haute société parisienne. Elle n'a que sept ans de plus que lui et ils partagent rapidement une forte complicité... dans un premier temps.
Nous avons donc une famille Rougon qui n'attire pas franchement la sympathie : Eugène ne parle à son frère que pour veiller à ce que ses éventuels impairs n'entache pas sa propre réputation (l'aîné ayant lui des ambitions politiques) ; Aristide est prêt à tout pour s'enrichir, sans scrupules et sans humanité, manipulant tout le monde même sa famille proche ; Sidonie, leur soeur, travaille dans l'ombre, mais ne vit elle aussi que pour la manigance ; et Maxime, la génération suivante, est d'une mollesse à faire peur, se laissant ballotter par les volontés de ceux qui l'entourent et décident de tout pour lui.
Et au milieu, cette pauvre Renée, qui semble-t-il a fortement choqué en son temps, et qui pourtant me semble la victime de tout cela, de son milieu, de sa position, de son mari...
J'ai le même point de vue que Stephie : ce roman est tout à fait révélateur de la pensée de Zola. Chaque famille est dominée par son vice, ici celui de l'ambition à tout prix, qui ronge leur vie personnelle et familiale, qui ronge leur âme, sans jamais qu'ils s'en aperçoivent.
J'ai lu ce roman dans le cadre du challenge de Moka : on a une relation comme ça, Emile Zola et moi.C'était la lecture de février, je suis presque dans les temps! Le mois prochain, les participants liront Le ventre de Paris.
Le billet entre aussi dans la catégorie "auteur enterré à Paris" du challenge nécrophile.
Les avis de Caroline, Cuné, Pimprenelle et Stephie.