Si par une nuit dhiver un voyageur dItalo Calvino
"Tu vas commencer le nouveau roman d'Italo Calvino, Si par une nuit d'hiver un voyageur. Détends-toi. Concentre-toi. Ecarte de toi toute autre pensée. Laisse le monde qui t'entoure s'estomper dans le vague. La porte, il vaut mieux la fermer ; de l'autre côté, la télévision est toujours allumée. Dis-le tout de suite aux autres : "Non, je ne veux pas regarder la télévision !" Parle plus fort s'ils ne t'entendent pas : "Je lis ! Je ne veux pas être dérangé." Avec tout ce chahut, ils ne t'ont peut-être pas entendu : dis-le plus fort, crie : "Je commence le nouveau roman d'Italo Calvino !" Ou, si tu préfères, ne dis rien ; espérons qu'ils te laisseront en paix."
En ouvrant ce livre, j’était pleine d’espoirs et d’attentes, et le début m’a comblée : vous pouvez en lire une partie juste au-dessus. J’adore les livres qui s’adressent aux lecteurs et celui-ci ne cesse de nous interpeller.
Le livre est ensuite construit de la façon suivante : un lecteur (auquel on s’adresse mais qui pourtant n’est pas vous) commence ce nouveau livre d’Italo Calvino, puis il se rend compte qu’il n’en a que le début, la suite appartient à un autre roman. Il se débrouille pour trouver quel est ce nouveau roman qui apparaît, mais là, re-frustration, un autre encore prend sa place au bout de quelques pages. Etc., etc. : tout le livre est fait d’une alternance entre chapitres consacrés à ce lecteur auquel l’auteur dit « tu » (« tu vas commencer le nouveau roman d’Italo Calvino ») et de chapitres qui sont autant de débuts de romans différents.
Au départ, je me suis prise au jeu, je trouvais l’idée excellente, puis je me suis lassée. Un lecteur des amazones qualifiait « si par une nuit d’hiver un voyageur » de brillant exercice de style, je suis tout à fait d’accord, c’est exactement ça. Simplement, au bout d’un moment, le style ne me suffit plus, je suis de ces lecteurs qui ont soif d’histoires (il y en a, me direz-vous, mais un peu trop, et dans tous les sens). Quitte à rester dans le genre Oulipo, je prends « les fleurs bleues » de Queneau et je le relis encore et encore, chose que je n’imagine pas à l’heure qu’il est avec ce bouquin de Calvino.
« Si par une nuit d’hiver un voyageur » et moi n’avons pas dû nous rencontrer au bon moment. Je reviendrai vers lui plus tard, dans quelques mois ou quelques années, et peut-être nous plairons-nous davantage.