Le poisson-scorpion de Nicolas Bouvier
Ce pourrait être le récit d'un séjour exotique, c'est le voyage intérieur d'un homme arrivé à Ceylan après un long périple, pour achever le voyage intérieur au bout de lui-même. Le narrateur fait lentement naufrage, enlisé dans la solitude et la maladie, frôlé par la folie.
Et là, sous l'oeil indifférent des insectes qui se livrent autour de lui à d'effroyables carnages, et des habitants qui marinent dans leur chaleur comme un sombre bestiaire fainéant, l'auteur reconstruit, avec patience et ironie, un monde luxuriant et poétique.
Au fil des chapitres, il observe et nous apprend à voir le spectacle mystérieux de ce monde des ombres d'où émergent d'étonnants portraits. Ainsi le lecteur participe à une sorte d'envoûtement dans ce récit bourré comme un pétard d'humour, de sagesse et d'espoir.
Nicolas Bouvier a un style particulier et intéressant. Il convoque un vocabulaire parfois sorti de son chapeau, ça donne un vrai charme à l’écriture.
Ce roman ne m'a pas captivée ; je crois que je ne suis pas faite pour les "récits de voyage", dans lesquels je n'arrive pas à me plonger. Cela dit, c'est tout autant un récit introspectif, et c'est peut-être grâce à cela que j'ai tout de même bien aimé lire ce livre.
Certains passages sont particulièrement plaisants, comme sa manie d'observer les insectes pendant des heures, ou encore sa rencontre avec certains personnages hauts en couleurs. Je pense à l'aubergiste et à l'épicière, mais aussi et surtout au père Alvaro, dont l'apparition est trop courte!