La passe dangereuse de Somerset Maugham
Peu de mondes semblent aussi éloignés l'un de l'autre que ceux de Somerset Maugham et de George Orwell. On découvre pourtant avec surprise dans un essai de l'auteur de 1984 qu'il admirait " immensément " Maugham pour son " talent à raconter une histoire sans la moindre fioriture ". Au lecteur de se laisser séduire par une invraisemblable histoire d'amour dans le Hong Kong de la grande époque coloniale anglaise avec adultère, épidémie, général chinois, bonnes sœurs... Ingrédients que Maugham mélange avec un art consommé du récit et une maîtrise raffinée de la " belle ouvrage ".
Kitty est une jeune femme écervelée, frivole, qui vit avec passion sa liaison adultérine avec Charlie, fonctionnaire haut gradé et non moins superficiel. Pourtant, Walter, son mari, est fou d’elle et fait tout pour la combler. Elle en a bien conscience, mais ça lui est royalement égal ; elle se trouve déjà bien magnanime de partager sa vie.
Kitty, donc, n’est pas franchement femme réfléchie ; lorsque survient « un certain événement » (ne spoilons pas !), elle n’en revient pas, n’ayant rien vu venir. Son cadre de vie change radicalement, et elle se pose bien sûr en grande victime.
Peu à peu, la misère de ceux qu’elle devra côtoyer la fait réfléchir et devenir plus humaine…
Elle m’a prodigieusement énervée à plusieurs reprises ; tout comme Walter m’a surprise et vraiment touchée. Ce court roman est une réussite, par le talent qu’a l’auteur de dépeindre la psychologie de ses personnages, de susciter chez le lecteur une profonde empathie et de l’immerger dans une atmosphère toute particulière, douloureuse mais « vivante ».
Merci à Stéphanie pour ce cadeau : c’est le livre que j’avais gagné cet été lors du pique-nique de la blogosphère !